Un sport sain, mais cher

Dr Bruno Gröbli


Assis devant le téléviseur, nous regardons ces athlètes accomplis. Quel spectacle! Qui n'aimerait pas avoir un corps - on dit aussi «body» - pareillement bâti ?

Le choix des activités sportives est immense. Plaisir garanti, mais qui a malheureusement ses inconvénients, comme toujours dans la vie. Car entre l'amusement et la sueur se glisse la loi de la gravité. Et ce n'est assurément pas un corps entraîné qui retombe sur le sol, mais un visage tordu par la douleur.

En Allemagne, 40% des patients des orthopédistes sont des sportifs amateurs accidentés. En Suisse, on compte chaque année 250 000 accidents du sport, qui coûtent 1,8 milliard de francs. Tous les ans, 170 personnes se tuent en faisant du sport.

Des campagnes de sensibilisation ont été lancées pour ralentir la recherche de la performance. Elles ont eu peu d'effets. Certes, les appareils de sport se sont améliorés. Mais à l'heure actuelle, qui dit mieux dit plus vite, et plus vite plus dangereux.

Voici donc une idée. Elle n'est pas toute neuve, mais elle est logique. Elle repose sur les principes de causalité et d'incitation. Tout comme le réfrigérateur pour garder la bière au frais comprend une taxe d'élimination, l'appareil de sport devrait comprendre une taxe de dangerosité, calculée sur la base de statistiques. Plus le sport générerait des coûts, plus la taxe serait élevée. Chacun y trouverait son compte: le fisc, d'abord, qui percevrait ainsi une contribution pour couvrir le coût des accidents; le sportif, ensuite, qui saurait à quoi sert son argent; le non sportif, enfin, qui ne veut pas payer ce que s'infligent les autres gens!

Les assureurs maladie et accidents ont opté pour d'autres stratégies. La SUVA a choisi comme message: «Attention les articulations». Elle nous offre ce cours d'anatomie sur les terrains de sport et à la télévision. L'agence de publicité a-t-elle toutefois pensé que le cerveau, en gonflant sous l'effet de la production accrue d'hormones induite par le sport, ne comprend presque plus le rapport qu'il y a entre l'anatomie et la physique? Il y aurait toutefois mieux encore: la gravité représentée en Terminator des articulations!

Les caisses-maladie, jamais à court d'idées, sont plus efficaces. Elles prennent généreusement en charge les abonnements des clubs de fitness. Les candidats sportifs s'enferment dans des salles climatisées, prennent place sur des sièges et bougent leurs articulations sous le contrôle des machines. Un personnel joliment vêtu les guide à travers la jungle des engins. Impossible de trébucher, la prudence règne. Et nous revoilà dans la même situation qu'au début: l'activité physique en position assise n'a-t-elle donc pas quelques avantages au niveau de la santé et des coûts...?

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